Palestine : le besoin de nuances.(lundi 26 janvier 2009, 19:50)

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Palestine : le besoin de nuances.(lundi 26 janvier 2009, 19:50)Durant les semaines qui avaient précédé le déclenchement de la première guerre contre l’Irak de Saddam Hussein, le Président François Mittérand avait évoqué l’évolution de la position qu’il avait prise au nom de la France à travers ce qu’il avait appelé le passage d’une  » logique de paix » à « une logique de guerre », en justifiant le passage à la deuxième par l’épuisement de toutes les possibilités que permettait la première.

La considération de ce passage, dans le temps et l’espace , d’une logique à une autre qui lui serait opposée, nous fait constater qu’en fait, ces options, politiquement différenciées, participaient toutes les deux d’une logique où le désir de paix faisait fonction de « couverture nécessaire » à une décision de participation à la guerre, dictée par le souci de préserver les intérêts de la France, en tant que grande puissance, qui devait se positionner comme telle, aux côtés de l’Amérique et de la Grande Bretagne.Cela a consisté à bien préparer la guerre tout en continuant à parler de paix.

C’est là l’un des usages de la diplomatie qui n’est pas une exclusivité israélienne; l’État sioniste l’ayant même érigé en « vision du monde ». Le recours à ce procédé, d’une manière grossière et expéditive, comme l’a fait l’Amérique de Bush, peut, en termes d’économie politique, s’avérer trop coûteux et aboutir à des conséquences catastrophiques, pas seulement pour ceux qui en sont les victimes.

C’est dire, en fait, que la guerre pour devenir politiquement rentable doit comporter dans sa stratégie globale un front diplomatique qui doit « couvrir » le front militaire. Cette extension de l’idée de « front » à l’activité diplomatique, exprimée au quotidien par les organes d’information, désigne, le fait qu’il n’y a, en toute vraisemblance, qu’une seule logique celle qui fait que pour réussir la guerre il faut la faire avec le désir,déclaré ou réel, de paix. La guerre nue est insupportable et la paix n’est pas de ce monde.

Tout se jouerait donc dans ce rapport nécessaire entre guerre et paix qui doit rendre la paix relativement viable et la guerre moins scandaleuse. Car ce rapport n’est pas des plus stables et son dosage relève souvent des différentes déclinaisons de  » l’Art  » de la Politique. Lequel pourrait être pratiqué, aussi bien par ceux qui disposent du pouvoir dans leurs rapports réciproques que par ceux qui n’en disposent pas mais chercheraient, quand bien même, à s’opposer à ceux qui en ont la maitrise.

Et c’est peut-être dans ce dosage de l’activité politique, en tant qu’art,que résiderait la différence que l’on pourrait trouver entre des usages différents de la guerre, par des hommes de pouvoir et des usages différents de la lutte armée par des hommes de résistance.

Je voudrais rappeler, ici, ce que j’avais introduit comme différence entre le Jihâd et la guerre sainte pour dire,également, que la résistance n’est pas la guerre. Il ne s’agit pas ici, comme l’ont compris certains « amis sur Facebook » de dire que la résistance armée n’est plus de mise et que l’on doit, face à un ennemi qui possède tous les atouts ne compter que sur l’action diplomatique. Ne pas recourir à la guerre pour un résistant ce n’est pas abandonner la lutte armée. Malgré les apparences, la situation internationale, aujourd’hui n’est pas moins favorable à la résistance armée que celles qui prévalaient à l’époque de la guerre d’Indochine , d’Algérie et du Vietnam. Il n’y a que des dirigeants incapables, comme ceux d’Israël, ou mal intentionnés à l’égard de leur propre pays, comme Bush pour croire que par la guerre et la guerre seule l’on peut arriver à en finir avec la résistance armée et que l’on peut se permettre, lorsque l’on s’estime assez puissant de n’avoir pour politique que la guerre. Confondre politique de dissuasion à l’égard d’un ennemi potentiel et « terrorisation » de « Tout le Monde », pour assoir sa suprématie absolue et déclarer l’histoire arrivée à son terme, c’est prendre l’instinct de domination pour la volonté de puissance  . C’est ce qui a emmené le régime hitlérien à sa perte et c’est ce qui est entrain de se dérouler, sous nos yeux, en Israël. Il s’agit dans ces différents cas, que représentent l’Allemagne de Hitler, l’Amérique de Bush et l’État d’Israël de pratique politique réduite à la seule dimension guerrière de l’horizon de laquelle la composante paix, nécessaire à toute activité politique viable, a été évacuée et réduite à des slogans creux et à des pétitions de principe.

Il en est de même pour le nécessaire dosage entre l’action dite diplomatique et celle de lutte armée au sein d’une activité politique de résistance. Les Palestiniens de Beyrouth assiégée n’ont pas été moins résistants que ceux de Gaza et Yasser Arafat s’est distingué aussi par sa capacité à organiser la lutte armée, à côté de son courage à dialoguer avec un adversaire à propos duquel il ne se faisait pas beaucoup d’illusions sur sa volonté réelle de paix. Israël ne lui pardonnera pas le fait qu’il aie réussi à transformer la Judée-Samarie en Cisjordanie occupée à l’intérieur de laquelle il s’est volontairement laisser assiéger et mourir en martyr comme il l’a martelé, durant des mois, face au monde entier.

Le mal dont souffre la Résistance palestinienne, c’est que certains de ses hommes, en accédant à l’Autorité se sont laissés transformer en responsables d’un état qui n’en était pas encore un. De résistants qu’ils étaient, ils sont devenus les représentants » politiques » d’un peuple sans état que l’occupant s’est empressé de discréditer, en ne respectant pas les accords les reconnaissant comme les représentants d’un Etat dont l’indépendance devrait être négociée avant la fin du siècle dernier. Ce qui n’a pas manqué de nuire énormément à la logique de résistance que Yasser Arafat, Salah Khalef, Khalil Al Wazir et beaucoup d’autres qui ont payé de leurs vies leur participation active à la résistance, ont réussi à faire fructifier, en transformant l’utopie, en processus de libération nationale. C’est la même illusion de l’existence, de fait, d’un état palestinien devenu l’objet de rivalité idéologique qui a été à l’origine du coup de Gaza que les responsables de Ramallah, ont qualifié de « coup d’état ». En conséquence de quoi, la logique de guerre dont se prévalent les tireurs de fusées du Hamas, permet aux Israéliens de continuer à faire main basse sur la Cisjordanie, objet réel de leur convoitises ,tout en faisant semblant de vouloir en finir avec les gouvernants de fait d’une bande de terre surpeuplée, et que leurs intérêts bien compris leur dictent de quitter à très brèves échéance.

L’un des obstacles à une clarification salutaire de la cause des Palestiniens, réside dans cette absence de nuances dans la désignation d’une réalité que les clivages idéologiques « généralisants » ne font que rendre encore plus opaque. Dans ce Moyen Orient dont la réalité est traversée de bout en bout de symbolique, l’on continue à ne pas voir que la réalité culturelle du chiisme libanais, dont les signes se laissent lire dans les pratiques politiques très élaborées, autant chez Hassan Nasrallah que chez Nabih Berri, est différente de l’islamisme crispé de Hamas et qui, en tant que tel , est manipulable à volonté.

Il n’y a rien de commun entre le souffle mystique du discours de Nasrallah, mobilisant ses résistants joint à une organisation rationnelle et moderne du front de l’information et de la communication, d’un côté, et la rancœur d’un Malki , signant l’arrêt de mort de Saddam.Ce n’est pas seulement une question d’hommes, exceptionnels ou pas, mais de culture.

Ceux parmi nos intellectuels qui ont le désir sincère de s’investir, d’une manière radicalement désintéressée, aux cotés du peuple palestinien, chacun de son lieu propre et à partir d’attitudes critiques, éloignées de tout sentiment de culpabilité, peuvent participer à cette clarification

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