Abdelkrim Zbidi, la compétence politique « a-politiques » (au pluriel).

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        Cela fait plus de huit ans que nous subissons la dictature des médias. De moyen de communication, ces derniers sont devenus producteurs de modèle de communication  qui, sous couvert d’efficacité et de rendement en la matière ont réduit le discours politique, qu’il soit du pouvoir ou de l’opposition en moyen de manipulation de masses. Cela transforme qualitativement la nature du discours politique en le vidant totalement de toute éthique et ce, en réduisant la parole d’une personnalité politique à n’être qu’un « message » destiné à « atteindre une cible » qui n’est autre que l' »individu isolé », que l’on se propose de « séduire ». De lieu d’échange, de débat et de « bien entendu » résultant d’une écoute réciproque, il est devenu porteur non pas d’une vision du monde mais d’une « visée ».Visée, synonyme d’ambition, d’arrière pensée, de dessein, d’intention, mais également de cible, de finalité et de mire.Et cela pour dire que lorsque une vision devient visée, elle devient « butée » et a par conséquent comme finalité  non pas un échange équitable qui aboutit au « bien entendu » mais une volonté de manipulation de l’individu cible à son insu.

       Jusqu’ici, il peut sembler que le seul manipulé à travers les techniques de communication c’est  le supposé « récepteur cible » que l’on rend cyniquement responsable de sa passivité qui le condamne  à être manipulable à merci.Mais à partir du moment où l’homme politique a recours aux techniques de communication, il n’est plus maitre à bord de son propre discours et ne peut plus émettre son discours propre. Au lieu de convaincre par la « légitimité » de son discours, il va soumettre ce dernier aux conditions techniques, érigées en science de la communication  médiatique. Et du coup il devient à son tour , non pas objet de manipulation , comme le récepteur, mais le support à travers lequel les techniques de communication vont faire passer leur contenu propre. Il n’y a pas qu’en Art que le contenu est indissociable de la forme dans laquelle il se re-produit.

          A titre d’exemple, et pour parler d’un sujet politique actuel,bien de chez nous, l’Appel à la prière par hauts parleurs diffère radicalement de l’Appel à la prière par la voix « nue » du muezzin . La voix nue invite et ponctue le temps infini qui s’écoule , en y inscrivant des repères qui divinisent le temps d’ici-bas. Alors que le haut parleur transforme l’appel  à la prière en injonction et en rappel d’obéissance à l’Ordre du Très Haut.

         Cela fait plus de huit ans que nous subissons la dictature des médias. Jusqu’à l’intrusion, non préméditée du grain de sable qui vient mettre à nu la nocivité du système. Il s’appelle Abdelkrim Zbidi, honnête, travailleur, responsable, rigoureux, méthodique et surtout « compétent » au sens américain du terme, c’est à dire qui n’est pas compétent dans une profession pour laquelle il a été formé, mais qui est  capable de mettre son intelligence pragmatique au service de la fonction dont il aura la charge, y compris celle qui consiste à créer sa propre entreprise. Sous la dictature, en tant que Recteur (Président d’Université) il trouvera, en lui-même, assez de force pour libérer l’expression au sein de l’Université de Sousse, dans la discrétion la plus a-politique. Ce qui lui donnera une étiquette de « technocrate » indépendant, à la différence de certains universitaires, parmi ses collègues qui s’étaient distingués par leur indignité. Son intelligence pragmatique et a-politique  ont fait de lui un grand ministre d’un grand ministère de souveraineté, a-politique par définition. Il s’agit du Ministère de la Défense, à un moment où notre Armée a été appelée à accomplir son devoir et à défendre la patrie contre l’agression extérieure et  l’action déstabilisatrice du pouvoir politique en place. Observez combien il est cohérent dans sa démarche et  dans sa vision de sa « compétence » propre. Jusqu’ici « a-politique », il a décidé de concourir par voie démocratique pour accéder à la magistrature suprême, poste réputé, lui aussi et par définition, a-politique.

        A-politique ne signifie pas anti-politique comme Athéisme ne signifie pas Anti-théisme. Car le champ politique, est  à deux niveaux. Le premier se rapporte au pouvoir dont la fonction est la gestion des affaires de la Cité par l’application de la Loi. C’est le niveau de « la politique » et le  Niveau Second, que l’on désigne au masculin : Le Politique que l’on peut se permettre de décliner comme « a-politiques » (politiques au pluriel) c’est à  dire qui  se situe à égale distance de toutes les politiques nécessairement partisanes.

Mais la fonction « a-politiques » de la Présidence de la République n’a été mise en évidence dans sa spécificité propre, qu’à partir de Béji Caïed Essebsi, élu au suffrage universel dans un système peu présidentiel. Et l’on peut remarquer que  de l’ensemble des candidats à l’héritage de Béji, il n’y a que Zbidi qui s’est limité dans ses ambitions politiques déclarées à la promesse d’accomplir, avec compétence les  fonctions « a-politiques » de la magistrature suprême, telle qu’elle est définie par la Constitution de 2014. Et dans cette fonction, il n’a pas besoin de recourir à la séduction médiatique , mais de continuer à être compétent, pragmatique et fort de son éthique décisionnelle qui le place au-dessus de la mêlée et fait de lui l’ultime recours et le magistrat Suprême dont le devoir est d’ouvrir tous les dossiers.

         Sans tenir compte des dérives politiciennes que connait la Tunisie depuis qu’elle a accédé, par surprise à l’âge de la démocratie, sans accéder nécessairement à l’âge de raison.

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